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Patrimoine
Les Pigeonniers
Monflanquinois* 1- Pigeonniers dans la bastide : - pigeonnier derrière l'église - Pigeonniers dispersés dans la bastide - 2- Pigeonniers hors la bastide a- La fonction et la construction du Pigeonnier : - avantages : la colombine - choix d'un lieu - construction - inconvénients b- Pigeonniers intégrés : Les Pigeonniers-sous-comble - Le pigeonnier-bolet - Le pigeonnier-porche - Le pigeonnier-tourelle - Le "Pigeonnier-Tour" c- Pigeonniers indépendants : Le Pigeonnier sur piliers en pierres - Le Pigeonnier-Tour carrée - Le Pigeonnier polygonal - Le Pigeonnier-Tour cylindrique à toit conique - Le Pigeonnier-Tour cylindrique à toit en dôme - Le Pigeonnier pied de mulet 4- Sites internet complémentaires
Pigeonnier Parmi les constructions les plus appréciées de la région, il faut bien avouer que les pigeonniers retiennent très souvent l'attention.* Que ce soit chez le visiteur simplement curieux de ce qui l'entoure ou chez le promeneur amoureux de patrimoine local,* l'intérêt est toujours aussi vif et mérité. Il y a là en effet le signe de tout un mode de vie qui s'est éloigné de nous progressivement et dont il ne reste plus que ces bâtiments plus ou moins bien entretenus, selon l'humeur des propriétaires actuels. Beaucoup de fermes ont sous leur toiture des ouvertures prévues pour accueillir les pigeons: pigeonniers parfois glissés à l'angle de la façade, comme on peut déjà en voir dans la bastide, d'autres fois bâtis sur le côté de la maison. Se promener dans la campagne c'est découvrir découvrir progressivement,* si on ne le savait pas au départ, que les "pigeonniers intégrés" sont multiformes et nombreux. En ce qui concerne les "pigeonniers indépendants" (1), c'est à dire détachés de la maison, leur découverte peut commencer aussi, comme pour les pigeonniers-sous-comble, lors d'une simple promenade dans la bastide, avant que de prendre la route vers l'extérieur à leur recherche. Ces pigeonniers dans la bastide, intégrés ou isolés, sont comme une invitation à se lancer dans la campagne environnante, pour de multiples "promenades-patrimoine", à la découverte des nombreux pigeonniers du Monflanquinois. De telles promenades, au vrai, amènent tout naturellement à s'interroger non seulement sur l' utilité de ces pigeonniers pour leurs propriétaires mais aussi sur les règles qui régissaient leur emplacement et leur construction. Au delà de la simple impression esthétique se dégage alors, pour l'observateur attentif, le sens réel de ces pigeonniers. * * * 1- Pigeonniers dans la bastide :
Son emplacement, dans le jardin d'une grande maison notable, en fait un symbole affiché de classe et de richesse d'Ancien régime..... Mais d'autres pigeonniers se sont glissés, çà et là dans la bastide, sous la toiture de maisons plus modestes Installés dans la ville, leur fonction de biens de production d'engrais naturel pour des sols manquant de fumure est pratiquement exclu. Reste donc l'intérêt que représentent les pigeons pour leur viande. Mais peut être faut il davantage prendre en considération l'existence d'une Société colombophile, avant guerre à Monflanquin, et admettre qu'il ne peut y avoir dans ces pigeonniers que l'expression d'un simple plaisir, d'un divertissement !
Par contre il faut monter sur la terrasse de la bibliothèque municipale pour apercevoir celui perché du côté du carrerot des Cabanes. C'est en redescendant que l'on découvre celui du jardin voisin. Vestiges d'une période révolue, il faut les répertorier avant qu'ils ne soient obturés à l'extérieur, comme c'est le cas dans une des maisons de la rue des Vignes où le pigeonnier n'est plus visible que de l'intérieur du grenier. * * * 2- Pigeonniers hors la bastide a- La fonction et la construction du Pigeonnier : Avant que d'aller plus avant dans le relevé des pigeonniers dans le Monflanquinois il est nécessaire de rappeler, même brièvement, les raisons de leur présence et les règles régissant leur construction. Ce n'est pas un hasard si, longtemps, ce fut le bâtiment le plus soigné de l'exploitation. En effet il abritait une richesse "la colombine" : fiente de pigeons, engrais des plus précieux . Elle remplaçait ou complétait les fumures du bétail; certaines cultures riches n'étaient possibles que grâce à cette colombine : le chanvre, le tabac. Les pigeons en eux-mêmes n'intéressaient pas; même pour la consommation locale, on s'en servait peu. (3) Un ouvrage du XVII° siècle (4) nous enseigne, à propos du colombier, que " Pour le bâtir on cherche un lieu qui lui convienne le mieux... on l'éloigne autant que possible de la maison, à cause du bruit et de la mauvaise odeur des pigeons qui d'ailleurs n'aiment pas être troublés par des allants et venants. Comme ils sont fort timides, il faut aussi les éloigner des arbres et des chutes d'eau. Il faut observer encore de placer le colombier un peu loin de toute pièce d'eau, afin que celle que les pigeons vont chercher pour eux et leurs petits, aie le temps de s'échauffer en chemin dans leur bec"..... "On bâtit la volière en un endroit où le chaud et le froid ne se fassent point sentir : elle doit être claire et avoir ses ouvertures vers le levant ou le midi.... On la bâtit toujours carrée soit de moellons ou de charpente. Le dedans doit avoir ses nids ou ses boulins de figure carrée; ils doivent être engagés dans le mur haut et large d'un pied, et aller profond pour pouvoir asseoir un pigeon à l'aise lorsqu'il couve. Quelques uns se servent de terrines ou de plâtre; d'autres n'ont que des paniers d'osier qu'ils attachent contre le mur... On ne met rien dans le fond des nids, parce que ces oiseaux prennent soin eux-mêmes de les garnir quand ils veulent pondre".... Ce qui n'est pas écrit mais qui était évident pour les usagers, c'est que l'abondance des pigeons n'allait pas sans inconvénient (3). Ils causaient dans les blés et le maïs de véritable déprédations. Pour s'en protéger les cultivateurs cherchaient à éloigner les pigeons de leurs propres champs; ils construisaient donc leurs pigeonniers souvent loin de leur maison, sur la bordure de leur domaine pour que les pigeons aillent chercher pâture chez le voisin. Une telle abondance allait à l'encontre des usages de l'Ancien Régime qui faisait du droit de colombage un privilège seigneurial, réservé à la noblesse.(2) Mais depuis un temps immémorial l'Agenais n'était pas soumis à cette règle, sans doute parce que depuis longtemps la culture réclamait comme indispensable le concours du fumier de pigeon... Autour de Monflanquin, comme dans le reste de l'Agenais, les pigeonniers étaient donc devenus la marque d'une aisance par la possession d'une certaine étendue de terre. Aussi mettait on de la vanité à posséder un beau pigeonnier. Emplacement déterminé et fonction établie, il reste à découvrir les différentes formes adoptées, d'une façon générale par les pigeonniers dans le Monflanquinois, en tenant compte de la classification communément admise (1) : > Pigeonniers intégrés : . - Pigeonnier-sous-comble . - Pigeonnier-balet . - Pigeonnier-porche . - Pigeonnier-tourelle . - Pigeonnier-tour > Pigeonniers indépendants : . - - Pigeonnier sur piliers . - Pigeonnier-tour carrée . - Pigeonnier-tour polygonal . - Pigeonnier-tour cylindrique .- Pigeonnier pied de mulet .
Ces pigeonniers peuvent se voir soit au dessus d'une maison d'habitation soit incorporés à un bâtiment annexe. Les quelques pigeonniers que l'on a dans la bastide donnent une idée précise de ce type de pigeonnier-sous-comble et de leur modestie. Il est évident qu'ils ne contiennent que quelques boulins, soit maçonnés dans le mur soit en vannerie fixée à ce mur. Le spécimen le plus classique est, sans conteste, le pigeonnier de la Place Caladon orienté plein Sud.
Ce type de pigeonnier, intégré dans le corps de la maison, n'est pas fréquent dans le Monflanquinois. Le meilleur exemple peut être vu à La Négrie, limitrophe à l'Ouest du canton.
Ce type de pigeonnier, fréquent dans l'Aveyron (6), l'est moins dans le canton. Un exemple cependant est observable au pied du versant Ouest de la bastide.
Au Nord de Monflanquin, une fois la Lède passée, la ferme de Roux en possède un, de forme particulière : base étroite avec évasement vers le haut. Il accroche le regard et surprend par son style quand on emprunte la route du Laussou.
* Le "Pigeonnier-Tour" intégré indirectement à la maison par une série de bâtiments intermédiaires est une variante du précédent.
Ce pigeonnier, sur la route de Cancon, offre en outre le grand intérêt d'être daté : du 9 Avril 1630. Autre intérêt : sur le côté extérieur Est, deux ouvertures voisines l'une de l'autre ressemblent fort à des meurtrières horizontales.... Le pigeonnier en question nous amène tout naturellement au Pigeonnier-Tour isolé, totalement indépendant de la maison.
L'ouvrage du XVII°, qui nous indique (4) les règles de construction, précise : " on proportionne la profondeur, l'épaisseur et la hauteur des fondements et des murs à l'étendue de la pièce...on fait chaque mur plus haut d'un quart que le colombier n'est large et il a pour l'ordinaire trois ou quatre toises de diamètres dans l' oeuvre...." "...on en fait des carrés et des ronds, ceux ci sont plus commodes... Un colombier a ordinairement deux ceintures en dehors, ou de pierre ou de plâtre, dont l'une règne au milieu du colombier et l'autre au-dessous de la fenêtre. Ces deux ceintures sont là pour reposer les pigeons... " L'architecte du XX° siècle, lui, nous explique (6) que : " La construction d'un colombier résulte... de l'ensemble des mesures de vides, de l'espace interne dans lequel les pigeons vivent et pondent... L'harmonie de ces façades provient d'un rapport d'équilibre entre les pleins et les vides, entre les creux et les saillies. L'espace interne transmis depuis des générations est le fruit de l'expérience directe et conditionne les proportions des volumes externes, c'est un fait fondamental dans l'élément architectonique...." Fort de quoi, il résulte de ces traditions quelques variantes notables dans la mise en oeuvre des volumes rendus nécessaires pour accueillir les pigeons.
* Le Pigeonnier sur piliers en pierres, *dans le Bas-Quercy, le pigeonnier pilotis représente sans doute le dérivé en dur de ce que l'architecture populaire avait érigé, avant le XVII° siècle, en structure légère de bois. La caisse est carrée et souvent en maçonnerie ou en colombages, posée sur des colonnes surmontées de chapiteaux, les "capel", pour décourager l'ascension de tous les prédateurs.
Ces pigeonniers-tour-carrée sont les plus nombreux sur le territoire du canton; leur taille est variable, plus ou moins imposante... L'un des plus spectaculaires d'entre eux, lorsque l'on arrive de Villeneuve à Monflanquin, est celui de Cambes : il se détache sur le plateau, dans son splendide isolement au milieu des terres. (7) Près de la bastide, le pigeonnier tout en hauteur de Séguy tranche avec la typologie classique des pigeonniers-tour-carrée plus massifs; comme une exception qui confirme la règle.
Cependant, tout au Nord du Monflanquinois, vers le château de Biron, le Bérail posséde un pigeonnier hexagonal dont le bâti est heureusement conservée, même si les pigeons ne sont plus qu'un lointain souvenir. On ne peut qu'apprécier l'esthétique harmonieuse d'un colombage mis en valeur par une toiture de tuiles plates.
* Le Pigeonnier-Tour cylindrique à toit conique,
Dans le Monflanquinois, il trouve son expression la plus parfaite à Roquefère. En effet il y a près du château la transposition réussie d' un colombier dont la description est donnée par Viollet le Duc dans son dictionnaire. Pour s'en convaincre il suffit de mettre côte à côte ce pigeonnier de Roquefère et la coupe dessinée par Viollet le Duc (8). Précision importante : d'une part le château est signalé dès le XIII° siècle dans l'histoire locale et d'autre part Viollet le Duc évalue que ses colombiers sont du XIV° siècle.... L'hypothèse d'un pigeonnier médiéval à Roquefère peut donc être raisonnablement avancée... Pour les pigeonniers-tour cylindrique, tout comme pour les pigeonniers-tour carrée, il existe également dans le canton une exception qui confirme la règle et les proportions classiques. En effet sur la route de Paulhiac se détache le pigeonnier rond et longiligne de Chabret. Sa hauteur amène à penser à un moulin qui aurait été converti en pigeonnier; version que retient d'ailleurs la tradition orale.... Enfin, un pigeonnier semi cylindrique est à noter à Grand Bordeneuve, près de Canabazès le Vieux. Totalement atypique il semble avoir été une fantaisie très individualisée de propriétaire. Il s'avère, en fait, qu'il ne s'agit pas à l'origine d'un pigeonnier, mais d'une tour de guet pour le château de Canabazes qui se situe en dessous, plein Sud. En effet, si l'on regarde de plus près, on constate qu'il reste trois meurtrières de défense sur cette tour de guet-pigeonnier .(9)
* Le Pigeonnier-Tour cylindrique à toit en dôme
Construit à plus cent mètres de la maison d'habitation , sa pierre de belle facture, dans toute l'épaisseur de ses quatre vingt centimètres, est associée à un toit à lanternon peu courant dans la région. A l'intérieur on peut dénombrer plus de quinze rangées superposées, de quatre vingt dix alvéoles chacune. Ce qui donne un total impressionnant de plus de mille trois cents alvéoles... Nombre approchant celui de Roquefère et donnant une idée de la masse de pigeons abrités !
* * * Le répertoire des pigeonniers isolés du canton fait apparaître que plus de la moitié de cette trentaine de pigeonniers sont des "'pigeonniers-tour carrée", que l'on peut donc considérer comme représentatifs du Monflanquinois. La cartographie de ces pigeonniers isolés souligne en outre leur importance au Sud-Ouest du canton et plus particulièrement à proximité des cours d'eau. Il y a là une indication précieuse d'une part sur les besoins en eau des pigeons et d'autre part sur les cultures pratiquées, quand on sait que la colombine était surtout recherchée pour les céréales. Ce relevé systématique, pour être complet, doit également prendre en considération et cartographier les "pigeonniers intégrés". Certains sont conséquents pour les exploitations concernées, d'autres plus petits sont cependant intéressants par leur nombre. En tout état de cause ils méritent que cette étude soit poursuivie dans l'espace considéré. Il faut enfin souligner que cette étude n'a de sens que si elle peut être reprise, par la suite, dans une synthèse concernant tout le département .... une fois les monographies réalisées canton par canton. Un travail minutieux dont les amoureux du patrimoine apprécieront les exigences. Odo Georges article paru dans la revue de la MJC de Monflanquin " Sous les Arcades "- n° 373 en Novembre 1996
1. - Eifler H "Pigeonniers Colombiers" - Sud Image 1994 2. - Odo G. "Pigeonniers dans la bastide" - SLA n° 348 1994 3. - Deffontaines P. "Les hommes et leurs travaux de la Moyenne Garonne" - Lille 1932 4. - Charles E. "La maison rustique" - Rouen 1637 5. - De Vivies B. / Poux P /Crier C. "Les pigeonniers de Midi Pyrénées" - Albi 1993 6. - Letellier D. "Pigeonnier de France" - Privat 1991 7. - Odo G. " Patrimoine, Patrimoine !" - S.L.A n° 360 1995 8. - Viollet le Duc E. "Dictionnaire d'architecture" - T. III Paris 1868 9. - Nicodeme F.X. : correspondance Sites internet complémentaires : @ Pigeonniers sur pilotis (retour) @ Description des pigeonniers (retour) @ Ensemble de sites sur les pigeonniers |